La rumeur était déjà confirmée depuis quelques mois, et Deezer est enfin passé à l’acte. Le user centric payment system (UCPS) est là ! Le user centric, qu’est-ce que c’est ? Une rémunération plus juste et plus directe des artistes, et une petite révolution dans le monde du streaming. 👉 Mode d’emploi
Le streaming, roi incontesté du marché de la musique
Ce n’est pas un secret, le streaming a pris une place prépondérante au sein du marché global de la musique, devançant la vente de supports physiques. Selon les chiffres du très sérieux SNEP (Syndicat National de l’Édition Phonographique), en France et en 2018 le streaming représente 335 millions d’euros du marché total de 735 millions, contre « seulement » 256 millions pour les ventes physique. Une tendance à la hausse, puis qu’entre 2017 et 2018, le streaming augmente de 19% alors que le physique perd 15% du marché :
« En 2018, la part des exploitations numériques franchit largement le cap des 50% du chiffre d’affaires annuel en France. Elles deviennent la première source de revenus du marché. »(SNEP)
Mais il ne s’agit pas de crier victoire trop rapidement : comme toute mutation rapide, le streaming est loin d’être parfait. La répartition des revenus issus du streaming (freemium et premium) a souvent été critiquée, et à juste titre. Le modèle prévalant se base sur deux sources de revenus : le freemium, qui consiste à écouter la musique « gratuitement » à condition de se taper des coupures pub et le premium, qui correspond tout simplement à un abonnement payant. On est donc en droit de se poser la question : à qui va l’argent ? Et la réponse est complexe.
Les revenus du streaming, un flou artistique
En avril 2018, Spotify entre en Bourse avec une capitalisation de 18 milliards de dollars fin 2018. Pourtant, en 2013 (déjà !) Thom Yorke twittait : « Ne vous y trompez pas, les nouveaux artistes que vous découvrez sur Spotify ne seront pas payés. Pendant ce temps-là, les actionnaires rouleront bientôt sur l’or », et en 2015 Taylor Swift demandait à la plateforme de retirer sa discographie en ligne : « Je ne veux pas que mon travail contribue à une expérience qui ne rétribue pas équitablement les auteurs et artistes ». En 2017, c’est au tour de l’Union des Producteurs Phonographiques Français Indépendants (UPFI) de regretter un système qui contribue « à écraser la rémunération de la plupart des titres qui ne figurent pas dans le sommet de la pyramide ».
Pour y voir plus clair, il s’agit d’identifier tous les ayant-droits : artiste, mais aussi label et tou.te.s ceux.elles impliqué.e.s dans la production phonographique. Selon l’ADAMI pour un abonnement à 9,99€ par mois, 0,46€ vont aux artistes, 6,54€ pour les intermédiaires (producteur.rice.s et plateformes de streaming,) 1€ pour le droit d’auteur et 1,99€ pour l’État. Pour gagner 100€, un.e artiste doit donc être streamé 250 000 fois en version payante, et jusqu’à 1 000 000 de fois en freemium ! Gagner sa vie grâce au streaming semble donc être réservé à une poignée de mastodontes qui font exploser les chiffres. Un système qui reproduit le cercle vicieux major-argent-investissement vs. indé-diy-débrouille déjà en place avant l’ère internet. Et dire qu’on croyait à une révolution.
| Voir aussi : Comment maîtriser les métadonnées musicales à l’ère du streaming et tracker ses ayant-droits
User Centric VS. Data Centric, vers une répartition plus juste et plus directe
On comprend donc pourquoi certain.e.s artistes ont du mal à se tailler une part du gateau. Pour simplifier (en enlevant la part des intermédiaires), sur les 10€ payés à la plateforme, la répartition se fait selon le pourcentage de streams global, et non pas selon l’écoute de l’utilisateur.trice qui paye. Si Billie Ellish représente 70% de l’ensemble streams sur Spotify, et Molly Nilsson 0.01%, alors la répartition Billie Ellish touchera 7€ et Molly Nilsson 0,01€, et ce même si l’utilisateur.trice en question n’écoute pas une seule fois Billie Ellish. Une façon de faire remise en question depuis plusieurs années, notamment par les labels indé, grands perdants de l’histoire.
C’est donc là où Deezer vient renverser la tendance. À la rentrée 2019, la plateforme de stream française (cocorico !) propose une répartition des revenus basée sur les goûts (et écoutes) de ses utilisateur.trice.s. Un modèle plus direct, qui semble n’avoir que des bénéfices :
- une réduction des fossés de revenus liés à un modèle obsolète
- un soutien direct des utilisateur.trice.s aux artistes, et notamment de niches (on pense aux fans de metal, de cold wave, de jazz et tous les genres qui doivent faire face aux géants de la pop et des musiques urbaines)
- promouvoir un environnement plus riche et divers en faisant la part belle aux artistes émergent.e.s, soutenu.e.s par une communauté active
- combattre les achats de stream et les comptes frauduleux, puisque seules les vraies écoutes sont prises en compte
Déjà soutenu par l’UPFI, le syndicat des managers, les services de distribution Idol et Believe ou encore Because, ce modèle ouvre donc la voie à une nouvelle ère du streaming, n’en déplaise aux fans et artistes de musiques indé et/ou underground. Reste à voir comment l’user centric payment system s’inscrira dans la durée. Affaire à suivre, donc.
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