Nous avons interviewé SIGIC, le Centre Slovène d’Information Musicale, qui travaille depuis des années au développement du marché de la musique en Slovénie et l’exportation de la musique Slovène à l’international ✈️
Nous pouvons considérer Groover comme l’avenir de la scène musicale internationale, qui préservera et enrichira sa diversité, préservera sa qualité et éduquera son public musical.
– Peter, SIGIC –
Peter, peux-tu te présenter en quelques mots ? Comment en es-tu venu à travailler dans l’industrie de la musique ?
J’ai rejoint l’industrie musicale alors que j’étais encore au lycée et membre du groupe slovène Zaklonišče prepeva qui était assez populaire à l’époque. Après avoir terminé mes études de philosophie et de sociologie de la culture à la Faculté de Philosophie de Ljubljana, j’ai commencé à travailler au ministère de la culture en tant que conseiller dans le domaine de la musique. Pendant cette période, j’ai continué à jouer de la musique ; j’ai enregistré pour différents groupes et je me suis de plus en plus ancré dans les différentes facettes de la scène musicale slovène. Sur la base de cette expérience, je suis devenu le directeur de SIGIC – Centre Slovène d’Information Musicale en 2014 ; SIGIC m’a permis d’établir des liens toujours plus étroits avec le monde musical international. J’ai reconnu le grand potentiel créatif musical slovène et j’ai réalisé qu’il s’accompagnait d’un manque de courage et de compétences, qui empêchait les artistes de présenter leur musique au grand public international.
Peux-tu nous en dire plus sur SIGIC ?
SIGIC est le Centre Slovène d’Information Musicale fondé en 2004. À cette époque, les centres d’information musicaux étaient très populaires en Europe. Ils servaient en quelque sorte de lien entre les scènes musicales et l’environnement Internet, qui, à l’époque, n’était pas aussi développé et largement utilisé qu’aujourd’hui. SIGIC a été créé à l’initiative de la société des compositeurs slovènes et a été principalement chargé de numériser les partitions musicales et autres matériels physiques, de créer des bases de données, et de présenter et promouvoir la créativité musicale slovène. Nos ambitions se sont accrues au fur et à mesure du développement d’Internet et de l’augmentation de nos connexions internationales grâce à notre adhésion à divers réseaux internationaux. En 2011, nous avons créé notre propre webzine musical Odzven, qui couvre tous les genres de musique slovène. Nous sommes également entrés dans le domaine de l’organisation d’événements. Avec SIGIC nous sommes co-producteurs du showcase festival et conférences MENT Ljubljana et principaux producteurs de Praznik Glasbe – la version slovène de la Fête de la musique. Aujourd’hui, nos regards se tournent principalement vers l’étranger.
| Voir aussi : Guide des Tremplins Musicaux 2020-2021
Peux-tu nous décrire un peu comment est le marché de la musique en Slovénie / les tendances actuelles ?
Avant tout, le marché de la musique slovène est exceptionnellement petit. Il y a deux millions de Slovènes au total, et il y a aussi très peu de minorités slovènes dans le monde. Cela ne permet pas d’offrir les meilleures conditions pour la musique en tant que profession. Nous avons également un retard considérable dans l’adaptation au saut numérique qui s’est produit dans l’industrie mondiale de la musique. Spotify n’est arrivé que récemment en Slovénie. D’autres plateformes de streaming existent, mais il n’y a pas encore d’éditeurs musicaux locaux dans notre région. L’utilisation gratuite de Youtube reste le mode de consommation de musique le plus utilisé. En même temps, l’octroi de licences de droits d’auteur sur Youtube doit encore être réglementé ici. D’autre part, notre scène de concerts est exceptionnelle. Nous avons le plus ancien festival de jazz européen – le festival de jazz de Ljubljana ; Tolmin compte deux festivals de renommée mondiale : MetalDays et Punk Rock Holiday, qui sont tous deux exceptionnellement intéressants pour les visiteurs étrangers. Nous avons Metelkova, l’une des versions les plus attrayantes de la culture alternative et des squats musicaux en Europe. Les salles de concert slovènes ne sont pas grandes, très peu de stars de renommée mondiale s’y retrouvent. En revanche, nos salles sont extrêmement bien entretenues et offrent des conditions de concert très professionnelles. Le public slovène est assez bien formé. La situation géographique de la Slovénie nous permet de recevoir de nombreux groupes en tournée lorsqu’ils passent à proximité, ce qui nous permet de connaître les tendances actuelles sur de nombreuses scènes musicales.
Voir aussi : Comment avoir plus de streams sur Spotify ?
Y a-t-il un bureau d’export en Slovénie ?
Malheureusement, notre système ne réglemente pas la présence de la culture et de l’art slovène à l’étranger. C’est précisément la raison pour laquelle nous avons l’intention d’innover et d’établir un modèle qui ne servira pas seulement la musique mais aussi d’autres formes d’art, ainsi que, en fin de compte, la politique culturelle de l’État. En 2019, nous avons fondé le Consortium Music Slovenia dans le but d’établir le bureau d’exportation de la musique comme une marque et comme une association de toutes les organisations et de tous les individus possédant le capital social et financier important pour la percée de la musique slovène à l’étranger. Sous cette marque, nous participons conjointement à des salons de la musique tels que Womex et Jazzhead et publions des compilations de musique slovène. Nous avons également mis en place le site Internet Music Slovenia où vous pouvez trouver des bases de données couvrant les musiciens slovènes et l’infrastructure musicale. Nous travaillons aussi intensément sur des événements éducatifs. Nous sommes conscients que l’une des tâches les plus importantes que doivent entreprendre les groupes ayant le potentiel de percer à l’étranger est de se préparer à l’exportation. Mais il est également nécessaire de former d’autres personnes : éditeurs, organisateurs de concerts, managers, agents, ainsi que des rédacteurs musicaux et des journalistes.
| Voir aussi : Comment bien négocier son contrat d’édition musical ?
Quel style de musique pensez-vous qu’il est plus facile d’exporter de la Slovénie vers le reste du monde ? Avez-vous des exemples de quelques groupes/artistes slovènes qui ont eu un certain succès dans d’autres pays ?
Nous avons des musiciens qui sont mondialement connus sur leurs scènes respectives : Laibach, DJ Umek, Gramatik, Luka Šulić of 2Cellos, Pertpetuum Jazzile … Nous excellons sur de nombreuses scènes de musique de salon, ce qui est probablement notre meilleure chance pour l’avenir. Nous avons également des cartes à jouer dans la musique classique contemporaine ; des compositeurs, tels que Vito Žuraj, Petra Strahovnik et Nina Šenk ; des artistes de la scène tels que l’accordéoniste Luka Juhart ; la scène expérimentale et d’improvisation composée de Tomaž Grom, Irena Tomažin, Maja Osojnik … Je suis heureux que ce soient surtout des représentants de la jeune génération qui travaillent aussi dur pour le développement de notre scène musicale locale. Ils ouvrent des portes aux autres. Je tiens à mentionner le groupe Širom. C’est actuellement le groupe slovène le plus en vogue sur la scène internationale. Ils jouent du folk imaginaire, construisent eux-mêmes la plupart de leurs instruments. Ils travaillent sous les auspices du célèbre label allemand Glitterbeat. Son directeur de programme, Chris Eckman, du groupe culte The Walkabouts, vit et travaille à Ljubljana. Nous sommes également en contact étroit avec lui, il nous aide et nous conseille beaucoup.
Quels sont vos projets pour l’année à venir ?
Sans la situation de COVID-19, l’année 2021 aurait été déterminante pour l’exportation de la musique slovène au niveau international. Mais nous ne sommes pas découragés, bien au contraire – en raison de l’affaiblissement de nombreux liens internationaux, nous allons progressivement étendre nos activités. Nous voulons d’abord établir des liens durables avec nos pays voisins, la Croatie, l’Autriche, la Hongrie et l’Italie, puis continuer lentement mais sûrement à partir de là. Nous tirerons parti de la situation actuelle où la vie sociale est presque entièrement vouée à l’internet et intégrerons autant que possible la musique slovène dans l’environnement numérique ; nous nous informerons également sur les outils disponibles dans toutes les facettes de l’industrie musicale et chercherons les possibilités de monétiser les activités individuelles dans le monde numérique.
| Voir aussi : Amuse – Le service de Distribution qui permet de diffuser gratuitement votre musique dans le monde entier !
Et enfin, que penses-tu que Groover apporte à l’industrie de la musique ?
À mon avis, Groover représente une pièce très importante de la mosaïque dans laquelle, grâce aux outils numériques, les musiciens ont un nombre croissant d’opportunités de créer et de développer leur carrière musicale par eux-mêmes sans avoir besoin d’investir des sommes énormes. Groover offre aux musiciens le chemin le plus court avec le moins d’intermédiaires vers leur public potentiel. On trouve de tels auditeurs aux quatre coins du monde. C’est un signe particulièrement positif, surtout pour les petites scènes musicales et les boutiques, ainsi que pour les petits marchés musicaux comme la Slovénie. D’autre part, Groover permet également la professionnalisation du journalisme musical. En Slovénie, par exemple, nous sommes confrontés à un paysage médiatique de plus en plus restreint pour la réflexion culturelle et artistique. Aujourd’hui, il est très difficile de convaincre les jeunes de chercher un emploi de critique musical. Groover pourrait leur fournir le motif pour commencer à construire leur infrastructure en tant que critiques. Groover est donc l’argument qui peut nous aider à passionner les jeunes pour les nombreux métiers de l’industrie musicale et à les présenter comme attrayants et prometteurs au niveau international. Nous pouvons considérer Groover comme l’avenir de la scène musicale internationale, qui préservera et enrichira sa diversité, préservera sa qualité et éduquera son public musical.