Lors de la dernière édition du Wallifornia Music Tech, nous avons eu la chance d’échanger avec Pablo Fleury, chargé de projets au sein de l’association Court-Circuit. Connu pour être le Pôle Musiques Actuelles de la Fédération Wallonie-Bruxelles, Court-Circuit favorise la reconnaissance de la scène musicale émergente en Belgique Francophone. En effet, ce petit territoire au marché musical complexe regorge de pépites musicales qui ne demande qu’à être soutenues et reconnues ! Pablo nous raconte plus en détail son soutien auprès des artistes :
Salut Pablo, peux-tu nous présenter rapidement Court-Circuit ? Quand et comment l’association s’est-elle créée ?
Dans les grandes lignes, Court-Circuit est une association qui a pour but de soutenir et participer au développement de la scène musicale émergente en Belgique francophone (« Wallonie-Bruxelles »).
L’association a été créé en 1992 sous l’impulsion de plusieurs programmateurs désireux de fédérer et mettre en réseau les acteurs de la musique pour mieux promouvoir la scène alternative en Belgique francophone. Et ainsi pouvoir offrir un soutien aux artistes émergents dans un paysage musical ou les opportunités de jeu se comptaient sur les doigts de la main.
Une des premières initiatives de l’association fut de mobiliser des professionnels autours d’artistes prometteurs pour monter des tournées communes, presser des compilations CDs, obtenir de la presse, etc … Ce qui petit à petit à donné lieu au Concours Circuit, notre tremplin phare aujourd’hui reconnu comme le plus important de la Fédération Wallonie-Bruxelles.
Quel est ton rôle chez Court-Circuit ?
Je suis chargé de projets (ce qui veut tout et rien dire). Dans les faits, je participe surtout à la réflexion et mise en place de nos dispositifs d’accompagnements pour musiciens. Cela va de la constitution de jurys de sélection à la coordination de résidences et soirées showcases dans nos salles partenaires, en passant par la réflexion graphique et la recherche de partenaires. Sinon je participe également au développement de nos outils en ligne, à la mise en place de nos événements communs au développement de notre réseau de salles … En bref, j’écris des mails et je vais voir des artistes sur scène !
Les missions et champs d’actions de Court-Circuit pour les artistes et professionnels belges sont multiples, peux-tu les éclaircir pour nous ? Parmi vos activités, quelles sont vos initiatives les plus récentes et dont vous êtes les plus fiers ?
Le but de l’association est de favoriser l’éclosion et la professionnalisation de la scène musicale émergente. Pour s’y prendre, on travaille principalement sur deux axes complémentaires.
Tout d’abord avec les artistes émergents : on participe à leur découverte, on les accompagne dans leurs besoins et on participe à leur promotion. Pour arriver à ça on organise essentiellement des séances d’infos, des appels à candidatures, on implique des professionnels… Une fois des artistes sélectionnés pour prendre part à nos dispositifs on mets en place avec eux des outils de promotion, du coaching scénique, des showcases, des moments de networking…)
Mais pour que les artistes puissent se développer, il doivent pouvoir se produire dans des conditions correctes dans des salles reconnues. C’est pourquoi le deuxième axe, c’est structurer, professionnaliser et et mettre en valeur les salles, festivals et orgas de concerts en Wallonie-Bruxelles. On développe un réseau pour lequel propose des soutiens financiers, on organise des workshops et des réunions de travail mais aussi des événements communs à tout le réseau. On travaille par exemple chaque année sur une étude chiffrée qui aborde la situation économique de ces petits et moyens opérateurs. Ce qui nous permet concrètement de comprendre quelles sont leurs réalités financières et d’endosser le rôle d’interlocuteurs de ce secteur auprès des pouvoir publics.
Vous accueillez de nombreux appels à candidatures pour des tremplins de renom. Combien d’artistes ont postulé jusqu’à présent ? Peux-tu nous parler de certains sélectionnés ?
On a développé il y a deux ans le site mycourtcircuit.be qui rassemble plus d’une 30aine d’appels à candidature pour des tremplins, festivals, premières scènes, etc … Il suffit que les artistes complètent une seule fois leur profil et ils peuvent ensuite postuler à toute une série d’appels à candidatures de manière simplifiée !
En moyenne, on dénombre entre 80 et 200 artistes qui postulent par appels (en sachant que l’on s’adresse principalement aux artistes de Fédération Wallonie-Bruxelles). Pour le moment c’est le tremplin de Dour qui détient le record avec 318 postulants pour son édition 2019 ! En 2018, on a accueilli pas moins de 36 appels qui ont permis de mettre en valeur plus de 100 projets.
Parmi les découvertes faites via la plateforme, difficile de ne pas citer Glauque, le collectif electro-rap qui est en train d’exploser en Belgique et en France. Lors de leur inscription au Concours Circuit, ils avaient 300 likes sur Facebook et le groupe n’avait sorti aucun son ! Avec le recul, l’outil a permis de dénicher plusieurs autres artistes qui ont rapidement gagné en visibilité, je pense à Glass Museum, Wyatt E. Lethvm, Endless Dive, Monolithe Noir, Jakomo…
Vous avez également la volonté de mettre à disposition des artistes des ressources riches et variées, notamment par le biais de votre tout nouveau site web. Raconte nous comment ça fonctionne !
Dans les années 1990, Court-Circuit avait notamment l’appellation et la mission de Centre d’Information du Rock. De fait, le recensement d’information et la création de contenu informatif et pédagogique a toujours fait parti de l’ADN de l’association.
Chaque année on édite une revue, distribuée gratuitement sur tout le territoire, où l’on développe des sujets qui touchent aussi bien au développement de projet artistique qu’à l’organisation de concerts, l’administration, la promotion, etc … Tous ces articles, et d’autres ressources que l’on essaye de tenir au mieux à jour se trouvent sur notre site web court-circuit.be qui vient en effet de subir un petit lifting bien mérité !
Quoi de beau à venir pour Court-Circuit dans les prochains mois ?
Le 7 décembre on organise le LOUDfest, un festival de showcase dédiée à la scène émergente de la scène « rock dur » et métal au sens large. On y présente quatre projets qu’on accompagne depuis septembre : Des Yeux (heavy drone), Let It Kill You (duo punk noise), Rope & Bones (duo post-hardcore) & Hybridism (prog djent). On accueillera également deux projets flamands sélectionnés également sur appel à candidature afin de mettre en valeur une sélection belge d’artistes à suivre ! D’ici là ces artistes seront à découvrir lors de plusieurs soirées dans des salles de notre réseau, comme le Reflektor à Liège, l’Entrepôt à Arlon ou le Magasin 4 à Bruxelles.
Y a-t-il selon toi des particularités au marché de la musique belge, et si oui quelles sont-elles ?
La particularité principale, c’est que la Belgique est un tout petit territoire, qui est divisé en deux. Pour tenter d’expliquer de manière ultra-résumée, on a d’un côté la Wallonie, de l’autre la Flandre. Les organisations, les financements, les politiques culturelles, les pouvoirs publics… y sont distincts. Du coup c’est un peu comme si on a à faire à deux territoires dans un même pays, et se faire connaître de l’autre côté de la frontière linguistique peut parfois relever du parcours du combattant. Au milieu de tout ça, on a Bruxelles qui a un statut de ville cosmopolite et européenne. La scène locale y est foisonnante, et les publics se mélangent sans y penser. Salles et artistes francophones, flamands, … le public n’en a parfois aucune idée ! Le brassage artistique y est particulièrement intéressant.
Pour finir, quels seraient tes conseils pour un jeune artiste belge qui souhaite accélérer sa carrière ?
Comprendre un maximum comment se structure le paysage musical belge. Qui bosse où, quel est le booker de tel artiste, dans quelles salles a joué ce groupe, à quel moment la programmation de tel festival est-elle bouclée.. S’intéresser aux aides financières qui existent et retrousser ses manches pour compléter des dossiers de subsides !
Un dernier conseil mais qui a son importance, c’est de rapidement envisager de sortir de la Belgique (francophone). On peut être rapidement confronté à un plafond de verre quand on a joué dans la plupart des salles et festivals et Wallonie-Bruxelles. Par contre la France, l’Allemagne, le Luxembourg, la Suisse.. Tout ça sont des terrains de jeu qui contribueront à grossir votre public et vous permettre de grandir !
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